Soutenance de thèse de Sarah ROUSSEL

Ecole Doctorale
COGNITION, LANGAGE, EDUCATION
Spécialité
Psychologie
établissement
Aix-Marseille Université
Mots Clés
Examen gynécologique,Dépistage du cancer du col de l'utérus,Représentations sociales,Psychologie féministe,Pluri-méthodologie,
Keywords
Gynecological examination,Cervical cancer screening,Social representations,Feminist psychology,Mixed-methods design,
Titre de thèse
Une approche psychosociale de l’expérience de l’examen gynécologique et du dépistage du cancer du col de l’utérus : entre prévention et intime
A psychosocial approach of the experience of the gynecological examination and cervical cancer screening : between prevention and intimacy
Date
Lundi 16 Décembre 2024 à 14:00
Adresse
Faculté ALLSH 29 Avenue Robert Schuman Bâtiment Egger 13100 Aix-en-Provence
C223
Jury
Directeur de these M. Thémistoklis APOSTOLIDIS Aix Marseille Université
CoDirecteur de these Mme Léa RESTIVO Aix Marseille Université
Rapporteur Mme Valérie HAAS Université Lumière Lyon 2
Examinateur M. Yannick JAFFRé CNRS
Rapporteur Mme Juliet FOSTER King's college London
Examinateur Mme Marie SANTIAGO-DELEFOSSE Université de Lausanne
Examinateur M. Vincent BRéJARD Aix Marseille Université

Résumé de la thèse

L’examen gynécologique (EG), dont le dépistage du cancer du col de l’utérus (CCU), apparaît comme un objet sensible au cœur d’enjeux sanitaires et sociétaux. De mauvaises expériences passées et une perception négative de l’EG sont largement pointées comme freins au recours au dépistage du CCU, avec de fortes inégalités sociales. Ces éléments font écho aux mobilisations féministes en gynécologie et à l’ampleur des témoignages de violences gynécologiques sur les réseaux sociaux. Une revue systématique de la littérature sur les perspectives des femmes et des professionnel·le·s sur l’EG a montré qu’en majorité, les études visaient à identifier les freins et facilitateurs au recours au dépistage du CCU, avec un manque de cadre théorique et conceptuel et peu d’études sur la perspective des professionnel·le·s. De multiple facteurs psychosociaux semblent en jeu dans le contexte de l’EG. Il apparaît comme une situation éminemment sociale dans laquelle s’actualisent des enjeux à la fois émotionnels, relationnels et socio-symboliques. Par une articulation entre psychologie féministe et approche des représentations sociales, cette thèse se donne comme objectif général de proposer une analyse psychosociale de l’EG pour une meilleure compréhension des logiques sociales et symboliques qui s’actualisent dans cette situation. Pour cela, nous cherchons à appréhender différents phénomènes socio-représentationnels liées à l’EG dans leur émergence et déroulement spontanés et en fonction du contexte de production, des modalités d’expression, ou selon les différent·e·s acteur·rice·s de la relation médicale. Dans une approche pluri-méthodologique inductive et qualitative inspirée de la triangulation, un dispositif de recherche s’appuyant sur un recueil in situ a été déployé. Il s’articule autour de trois opérations de recherche : une analyse à partir de forums et de témoignages sur les réseaux sociaux, des observations de consultations gynécologiques sur six structures médicales à Marseille et des entretiens semi-directifs auprès de praticien·ne·s et de femmes, en contexte de précarité ou non. Plus qu’une pratique médicale, les contributions empiriques mettent en avant que le rapport à l’EG s’appuie plus largement sur des savoirs sociaux pré-existants et symptomatiques des rapports sociaux de domination liés au genre et au pouvoir médical, dont le contenu peut dépendre du contexte de production et de la place prise pour le penser. Différents horizons sont pris pour penser l’EG : un horizon préventif et un horizon intime, reflétant diverses significations centrales associées. L'articulation entre la dimension préventive et la dimension intime se manifeste au travers des pratiques liées à l’EG. Si le rôle des professionnel·le·s et de leurs pratiques paraît central dans la qualité de l’expérience de l’EG pour les femmes, les professionnel·le·s font également part de tout un travail actif pour rendre acceptable l’examen et consolider l’idée de la nécessité d’un suivi gynécologique régulier. Les pratiques liées à l’EG font ainsi l’objet d’une importante ritualisation, visant notamment la neutralisation de la dimension intime, mais aussi de fluctuation selon les professionnel·le·s et les caractéristiques psychosociales des patientes. Certaines pratiques semblent avoir fait l’objet de transformation au regard des évolutions du modèle relationnel en médecine. Toutefois, des discordances entre pratiques effectives et discours sur les pratiques émergent face à certains enjeux saillants de l’EG comme le consentement ou la gestion de la douleur. Enfin, l’ensemble des résultats converge vers un point : les femmes ont de mauvaises expériences liées à l’EG et en gynécologie. Pour autant, ce qui est considéré comme de mauvaises expériences, de mauvaises pratiques et/ou de violences gynécologiques fait l’objet de diverses prises de positions et significations associées. Ces contributions nous amènent à des implications théoriques et des préconisations pratiques.

Thesis resume

The gynecological examination (GE), including cervical cancer screening (CCS), appears to be a sensitive subject at the heart of health and societal issues. Past negative experiences and a negative perception of GE are widely cited as barriers to undergoing CCS, with significant social inequalities. These elements echo feminist mobilizations in gynecology and the widespread testimonies of gynecological violence on social media. A systematic review of the literature on the perspectives of women and professionals regarding GE showed that most studies aimed to identify the barriers and facilitators to CCS uptake, with a lack of theoretical and conceptual frameworks and few studies focusing on the perspective of professionals. A multitude of psychosocial factors seem to be at play in the context of GE. It appears as a highly social situation in which emotional, relational, and socio-symbolic concerns actualize. Through an articulation between feminist psychology and the socio-representational approach, the general objective of this thesis is to propose a psychosocial analysis of GE for a better understanding of the social and symbolic logics that actualize in this situation. To this end, we seek to understand various socio-representational phenomena related to GE in their spontaneous emergence and unfolding, depending on the context of production, modes of expression, or according to the various actors in the medical relationship. Using an inductive and qualitative mixed-method approach inspired by triangulation, a research framework based on in-situ data collection was developed and revolves around three research operations: an analysis of forums and testimonies on social media, observations of gynecological consultations in six medical centers in Marseille, and semi-structured interviews with practitioners and women, in precarious contexts or not. More than a medical practice, the empirical contributions highlight that the relationship to GE relies more broadly on pre-existing social knowledge symptomatic of social power dynamics linked to gender and medical authority, the content of which may depend on the context of production as well as the space given to reflect on it. Different horizons are considered when addressing GE: a preventive horizon and an intimate horizon, reflecting diverse central meanings. The articulation between the preventive and intimate dimensions is manifested through the practices related to GE. If the role of professionals and their practices seems central to the quality of the GE experience for women, professionals also report a significant amount of active work to render the examination acceptable and reinforce the idea of the necessity of regular gynecological follow-up. Practices related to GE thus undergo a significant ritualization, particularly aimed at neutralizing the intimate dimension, but they also fluctuate depending on the professionals and the patients’ psychosocial characteristics of the patients. Some practices seem to have evolved in response to evolutions in the medical relational model. However, discrepancies between observed practices and discourse about them emerge in the face of certain key issues in GE, such as consent or pain management. Finally, the overall results converge on one point: women have negative experiences related to GE and gynecology. At the same time, what is considered negative experiences, poor practices, and/or gynecological violence is subject to various position statements and associated meanings. These contributions lead us to theoretical implications and practical recommendations.